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Ituri – Journée mondiale de la liberté de la presse : comprendre le rôle de la presse dans une société avec le journaliste David Ramazani

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Par la Rédaction

Ce 3 mai, c’est la célébration de la Journée mondiale des droits de la presse. En République démocratique du Congo l’on s’inquiète toujours de la montée de la censure contre la presse et la liberté d’expression.

Pour tenter d’éclairer la lanterne de l’opinion publique [locale iturienne pour notre cas] qui semblerait ne pas comprendre le rôle ou l’importance de la presse, du média ou du journalisme dans une société, la rédaction Ituri Kwetu vous propose l’entretien qu’il a eu avec un journaliste acharné et chevronné de la province de l’Ituri. David Ramazani est doublement directeur de média en ligne buniaactualite.cd et de Radio de l’Université de Bunia, tous ces deux médias sont basés à Bunia, capitale provinciale de l’Ituri.

Avec ce directeur de deux différentes maisons de presse, nous avons abordé quelques questions en rapport avec les droits de la presse et l’exercice de la fonction d’un journaliste dans la société. Nous vous proposons l’intégralité de cette interview.

IK: Monsieur David Ramazani, bonjour!

DR: Bonjour.

IK: Monsieur David, selon vous, pourquoi, les hommes de médias deviennent de plus en plus les cibles de la justice, de la politique, des groupes armés, victimes des menaces physiques comme téléphoniques?

DR: La réponse est à deux volets: nous vivons déjà dans un environnement où l’insécurité est monnaie courante. Donc, il y a la présence des groupes armés, la présence des bandits armés ainsi de suite. Donc, d’abord tout le monde est la cible de ces hommes armés, là je parle des bandits et des groupes armés. Donc la population civile, vous avez vu même des religieux, ils ont été visités. Donc tout le monde. Personne n’est épargné. Il y a même parfois des maisons des agents de l’état. Donc, tout le monde est embarqué dans ce bateau là. [Bref, ndlr] les journalistes vivent dans un environnement déjà teinté de l’insécurité et ils ne sont peut-être pas ciblés directement, mais c’est le contexte. Le deuxième volet de la réponse : je pense que nous vivons dans une province sous état de siège où les libertés individuelles sont restreintes. Mais au-delà de cet aspect de choses, nous vivons déjà dans un pays où parfois dire la vérité fait mal et ça choque. Et le journaliste en tant que quatrième pouvoir, il est censé relayer au grand public des choses qui parfois, ne devraient pas l’être selon certains… hommes politiques ou ainsi de suite et ça choque parfois des politiques ou des groupes armés quand on relève certains dossiers et ca fait en sorte que le journaliste soit la cible des hommes politiques, des groupes armés ainsi de suite. Sur l’autre volet, c’est aussi le fait que nous soyons dans une situation spéciale qui est l’état de siège, ça restreint un certain nombre de liberté.

IK: David Ramazani, il se peut que le vrai rôle du média ne soit pas vraiment connu ou reconnu de/par tous; ne serait-ce pas une raison de plus pour plusieurs de s’attaquer aux journalistes? Voudriez-vous nous expliquer clairement le rôle et l’importance du média ou du journaliste dans une société ?

DR: Pour moi, le journaliste ou le journalisme ou le média joue un véritable rôle dans la société parce qu’aujourd’hui, chaque personne quand elle se réveille le matin, la première des choses, il faut lire sur les médias en ligne par exemple : qu’est-ce qui se passe dans la société ? D’autres personnes qui aiment suivre la radio, doivent ouvrir leur poste récepteur pour suivre, savoir être au rendez-vous des actualités et ceux-là qui veulent la télé. Donc, il n’y a pas une société sans média à mon sens. Donc la société et le média, c’est un mariage vraiment très fort où le divorce n’est pas vraiment sur l’ordre du jour.

Ce n’est pas pour rien qu’on dit que le média est le quatrième pouvoir. Le media est le quatrième pouvoir parce qu’il joue au moins cet équilibre là entre les dirigeants et les gouvernés; entre les bas peuples et ceux qu’on peut qualifier « des hommes forts ». Donc, le journalisme ou le journaliste, lui, il joue ce rôle là intermédiaire entre deux couches de populations ou deux catégories de personnes qui, dans une situation normale, ne peuvent pas se voir, ne peuvent pas communiquer facilement par exemple qu’aujourd’hui, il y a des déplacés qui vivent dans des sites ainsi de suite, si aujourd’hui ils décident par exemple d’aller voir l’autorité de la place, il auront des difficultés d’être acceptés ou d’être reçus facilement. Alors que le journaliste peut jouer l’intermédiaire : il peut amener les doléances de ces bas peuples vers …

IK: Que recommandez-vous aux journalistes pour un exercice professionnel sans être inquiétés? Ou mieux, que préconisez-vous aux journalistes face au musèlement de leur liberté pour un exercice garanti, notamment dans un contexte sécuritaire instable où la province a été placée sous l’état de Siège ?

DR: Nous vivons déjà dans un pays où au-delà du Code d’éthique et de Déontologie du journalisme, il y a une nouvelle loi sur la presse où on parle de « Loi Muyaya » où on aborde des aspects numériques ainsi de suite. Dans cette loi, il y a beaucoup de restrictions par rapport aux libertés des journalistes. Alors, cette loi pour moi, elle n’est pas mauvaise parce que ça vient réglementer certaines choses à l’heure du numérique, on a tout ce qu’on a comme désinformation, on a la mésinformation ainsi de suite ce qui contribue parfois à l’incitation à la haine : il fallait réglementer le secteur. Mais à un certain niveau, cette loi vient restreindre davantage la liberté d’expression et du moins, la liberté de la presse. Donc à cette heure du numérique et à l’heure de nouvelle loi, je pense que le journaliste est censé rester de plus en plus église au milieu du village et aussi prendre le Code d’éthique et de Déontologie du journalisme congolais comme une bible et ne pas s’écarter de ses missions. Je pense que pour un journaliste qui travaille en respectant ce qu’il est censé faire, ce qu’il n’est pas censé faire, il ne sera pas vraiment inquiété.

IK: Et aux gouvernants, que recommandez-vous dans le sens d’accompagner les médias dans l’exercice de leur rôle ?

DR: En principe, les médias ou les journalistes ne sont pas ennemis des gouvernants. Je pense qu’il est important que cette collaboration soit toujours là parce que les garants de la nation ou de la sécurité, la protection de toute personne restent les gouvernants. Ils sont censés jouer le rôle d’assurer la protection du journaliste, ça c’est le premier volet. Et l’autre volet, c’est aussi de promouvoir en fait. La presse n’est pas de plus en plus mettre des freins pour la promotion de la liberté de la presse. Et les gouvernants doivent laisser libre accès aux sources d’informations parce que là aussi c’est un autre problème. Beaucoup de journalistes n’ont pas facilement libre accès à des sources d’informations pourtant, c’est une violation de la loi. Les journalistes devaient et doivent d’ailleurs, avoir une liberté d’accès aux sources d’informations. Au-delà de ça, je pense que les gouvernants doivent mettre en place des mécanismes d’assainissement de la profession. Pourquoi je le dis ? Parce que n’importe qui ne peut pas se réveiller un matin, il dit: je deviens journaliste sans suivre les normes. Il fallait qu’il y ait un mécanisme un peu contraignant aussi pour mieux identifier les journalistes à travers par exemple l’UNPC ou encore d’autres corporations et aussi avec l’appui du gouvernement pour qu’on n’ait pas de personnes infiltrées ou de personnes qui ne remplissent pas en fait les critères ainsi de suite. Et le dernier volet, je pense que nous vivons dans un pays où peu de journalistes congolais bénéficient à des formations pourtant notre pays qui est au cœur même de l’Afrique, et présente plusieurs atouts, parfois il y a des partenariats ainsi de suite, mais les journalistes n’en bénéficient pas. Avec le contexte de la mondialisation avec le contexte du Code du numérique, le Code d’éthique et de Déontologie et tout ce qui va avec, pour moi, il est important que des séances de remise à niveau soient organisées de temps en temps : les journalistes entre eux et même avec l’appui du gouvernement et d’autres partenaires.

Je pense que c’est tout.

IK: David Ramazani Merci.

Rédaction

Un collectif des blogueurs regroupant des jeunes journalistes, étudiants, analystes et intellectuels passionnés de l’écriture et de nouvelles technologies de l’information et de communication.

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